Les outils et technologies qui facilitent le travail des journalistes en 2024

 

Les avancées technologiques ont considérablement transformé l'univers du journalisme. Les professionnels de l’information peuvent désormais compter sur des outils innovants et performants pour gagner considérablement en efficacité et s’adapter aux mutations de leur profession. Zoom sur l’arsenal du journaliste moderne.

Près de la moitié des rédactions à travers le monde utilisent déjà des outils d’intelligence artificielle. C’est ce que révèle une étude de l’Organisation mondiale de la presse, la World association of news publishers (WAN-IFRA) publiée en mai 2023 en collaboration avec Schickler Consulting.

S’il y a quelques décennies seulement, les journalistes se contentaient de travailler avec un carnet, un stylo et un téléphone, ils s’appuient donc désormais sur des technologies de pointe. Mais quels sont leurs outils fétiches, dans cette nouvelle ère de l’information ? Et quelle est la « stack technique » idéale pour un journaliste en 2024 ? Voici notre sélection.

Des outils de veille et de recherche d’informations de plus en plus puissants

 D’après le rapport sur l’état des médias 2023 de Cision, 96 % des journalistes utilisent les réseaux sociaux dans le cadre de leur travail, que ce soit pour faire de la veille, pour se connecter avec des experts ou encore pour repérer des « trending topics ». Mais pour tirer efficacement parti de X, Instagram ou encore Facebook, les journalistes sont nombreux à utiliser des outils tiers, qui leur permettent de suivre des mots clés spécifiques ou d’analyser des tendances.

On peut par exemple citer l’extension CrowdTangle, dédiée au « social listening », ou bien l’outil Tweetdeck, récemment rebaptisé XPro, qui propose un tableau de bord pour suivre des comptes, des hashtags ou encore des mots clés spécifiques sur X. Longtemps gratuit, il est récemment devenu payant suite aux dernières évolutions de la plateforme X.

Au-delà des réseaux sociaux, les professionnels de l’information sont également nombreux à utiliser les outils de veille Google (Google Alerts, Google Trends), et à avoir recours à des salles de presse digitales. Avec MediaConnect, par exemple, ils peuvent accéder à tous les communiqués de presse partagés sur la plateforme, en les filtrant selon les thématiques qui les intéressent et en paramétrant des alertes personnalisées. De quoi faire une veille efficace, tout en luttant contre l’infobésité. 

Des outils de production de contenu multimédia toujours plus accessibles

Selon Cision, 45 % des journalistes affirment cette année avoir intégré à leurs articles des infographies, 43 % des vidéos, 28 % des posts médias sociaux et 13 % de l'audio. Et pour cause, il existe aujourd’hui une multitude d’outils permettant de les créer, sans avoir besoin de compétences graphiques très poussées.

Canva permet par exemple de créer des visuels en quelques clics, tandis que Dalet Flex offre des fonctionnalités simplifiées de montage et d’édition de vidéos, et Datawrapper démocratise la visualisation de données. Les outils pour enregistrer, monter, éditer et diffuser des podcasts se sont également multipliés : Zencastr, Audacity ou Ausha en font notamment partie.

Des plateformes de publication et de diffusion adaptées aux besoins des journalistes

Le CMS (Content management system) est bien souvent l’outil central de tout média d’information en ligne. Il s’agit en effet de la plateforme qui permet d'organiser, de publier et de diffuser le contenu de manière structurée, et, dans certains cas, de le monétiser.

Le magazine britannique Press Gazette, s'est récemment associé à l'outil d'analyse de sites web BuiltWith, pour analyser plus de 2 000 des principaux sites d'actualités du monde et répertorier les CMS les plus utilisés. Selon cette étude, 44 % des médias en ligne utilisent la solution open source Wordpress, parmi lesquels The Economist, Al Jazeera, ou The New York Times. En deuxième et troisième position, on retrouve Drupal et Hubspot CMS Hub.

Les journalistes sont également de plus en plus nombreux à se tourner vers des outils de diffusion dédiés aux réseaux sociaux comme Hootsuite ou Buffer, qui leur permettent de planifier leurs posts et d’automatiser certains aspects de la diffusion de leur contenu.
 
Dans ce contexte, les professionnels de l’information consacrent de plus en plus de temps et d’énergie à vérifier leurs sources. Heureusement, des outils émergent peu à peu pour les assister dans cette tâche :

  • Botometer permet par exemple de vérifier l’authenticité d’un compte X.
  • L’outil YouTube Dataviewer d’Amnesty International aide à extraire les métadonnées de contenus diffusés sur la plateforme YouTube.
  • InVID aide à évaluer la véracité de vidéos.
  • TinEye est un moteur de recherche d’images inversé.
     

Le géant Google propose par ailleurs lui-même un outil dédié à la vérification des informations : Fact Check Explorer. Les ressources à disposition des journalistes se multiplient donc, même s’il faut souligner qu’elles sont rarement fiables à 100 %.

Une nouvelle génération d’outils de rédaction et d’édition, basés sur l’IA

Comme nous l’évoquions en introduction de cet article : l’intelligence artificielle fait actuellement une entrée fracassante dans le monde de l’information, et en particulier le robot conversationnel ChatGPT. Les journalistes sont déjà nombreux à l’utiliser pour condenser des informations, corriger des textes ou encore trouver des idées de sujets.

En juillet dernier, Google a par ailleurs annoncé le lancement prochain de « Genesis », un outil d’intelligence artificielle visant à aider les journalistes à écrire des articles de presse. Il vise à proposer tout un ensemble de fonctionnalités dédiées aux journalistes en matière d'agrégation de l’information, de synthèse et d’aide à l’écriture.

Cette annonce a évidemment suscité de vives réactions et inquiétudes de la part de la profession, mais le New York Times, le Washington Post ou encore le Wall Street Journal font partie des grands médias qui souhaitent explorer les possibilités qu'offre le futur outil. Les technologies qui facilitent et transforment le travail des journalistes n’ont donc pas fini d’évoluer !

 Ecrit par : J. Bayard 

 

 

 

«IL FAUT OSER CASSER LES BARRIÈRES ET POUSSER LES PORTES» : LES AGRICULTRICES LUTTENT POUR L'ÉGALITÉ DES GENRES DANS LE MONDE AGRICOLE

Longtemps mises à l'écart, et pourtant indispensables au renouvellement d’une profession en proie à une crise démographique inédite, les agricultrices demeurent confrontées aux inégalités de genre, malgré des avancées statutaires qu’elles ont su arracher au fil des années. À l’occasion du 60e Salon de l’Agriculture, CNEWS est allé à la rencontre de trois d’entre elles, aux parcours différents mais aux problématiques similaires.

 Elles s’appellent Valène Écorce, Delphine Chamard et Lise Trigosse. Les deux premières sont éleveuses, et représentantes du collectif «Les Bottées», une coopérative composée d’une vingtaine d’agricultrices, issues de Vendée et de Charente-Maritime, tandis que la troisième est étudiante, en lycée agricole, et en passe de reprendre l’exploitation familiale, une ferme de 80 bêtes sur le plateau de l’Aubrac, en Lozère. Toutes les trois ont un objectif commun : rendre visibles les femmes dans ce milieu majoritairement masculin et prouver qu'une femme a autant sa place qu'un homme sur une exploitation. 

«L’idée c’est de montrer que les femmes peuvent être agricultrices, et diriger une exploitation. Aujourd’hui elles sont formées, comme les hommes, et elles doivent prendre confiance en elles pour ne plus hésiter à s’installer, à se former si ce n’est pas le cas, et à communiquer, où à s’engager dans des coopératives», avance Delphine Chamard, 34 ans, installée depuis 2019 et responsable d’une exploitation de 35 vaches de race Limousine, ainsi que d’un élevage de poules pondeuses reproductrices, le seul de sa région (Charente Maritime).

«C'est aussi ça le but du collectif "Les Bottées", on aime rappeler que nous sommes un groupe de "Positives Agricultrices" de la coopérative agricole Cavac, animées par la volonté de promouvoir la féminisation en agriculture. Nous sommes des femmes avec des parcours très variés, mais ce que nous voulons c'est sensibiliser notre écosystème à l’enjeu de la féminisation. Nous sommes convaincues que la féminisation profite tant aux hommes qu’aux femmes», ajoute Delphine Chamard.

«Il faut oser. Il ne faut plus se poser de questions. C’est vrai que parfois, dans nos exploitations, on entend encore des commerciaux nous demander "Il est où le patron ?" car certains ont du mal à imaginer qu’une femme puisse être cheffe d’une exploitation. Mais on voit quand même que ça s’améliore d’année en année, ça progresse, y compris dans les lieux de formation, où l’on voit de plus en plus de jeunes filles», abonde Valène Écorce, cunicultrice en Vendée. 

45% DE FILLES DANS L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE 

En effet, il existe une véritable évolution positive de la place des filles dans l’enseignement agricole. Ce dernier, qui regroupe l’enseignement technique agricole (jusqu’au bac ou BTSA) et l’enseignement supérieur agronomique, vétérinaire et de paysage, compte 154.000 élèves et 43.000 apprentis. Parmi eux, selon les chiffres du ministère de l’Agriculture, 55% sont des garçons et 45% sont des filles. 

Par ailleurs, en 1975, 20% des étudiants de l’enseignement supérieur agricole long (études agronomiques, vétérinaires et de paysage) étaient des femmes. En 2020, elles représentaient 62% des effectifs. Concernant l’enseignement technique : à la rentrée 2020, les filles représentaient 48,6% des effectifs des élèves, des apprentis et des étudiants de l’enseignement supérieur agricole court (BTSA).

Un véritable développement de l’intérêt des jeunes filles pour le monde agricole confirmé par Lise Trigosse, bientôt 18 ans et étudiante en classe de première en Bac Pro CGEA (Conduite et gestion d’une entreprise agricole). «Nous sommes huit filles sur treize dans ma classe, et de mon côté, même si j’avais d’abord envisagé une autre formation, je me suis rapidement tourné vers le monde agricole, notamment pour avoir la possibilité de travailler en famille et de reprendre l’exploitation familiale», a-t-elle affirmé. 

Pour la jeune femme, comme pour beaucoup d'étudiants, c’est pendant la période du Covid-19 que sa réflexion a évolué. «Pendant cette longue pause, j’ai eu le temps de bien réfléchir et j’ai choisi de reprendre l’exploitation. Je passais beaucoup de temps à aider mes parents, cela m’a plu et j’ai décidé de continuer sur cette voie», détaille l’étudiante. Mais si Lise Trigosse peut aisément faire le choix de se tourner vers le monde agricole, c’est aussi parce que le statut des femmes dans le milieu a beaucoup évolué. 

UN CHEF D'EXPLOITATION SUR QUATRE EST UNE FEMME

Si les femmes ont depuis toujours joué un rôle crucial dans la vie des exploitations, celui-ci n’a pas toujours été reconnu comme tel. Jusqu'au début des années 1960, le rôle de la femme dans l'agriculture n'était pas considéré. Le terme d'agricultrice n'existait pas. Il n'est rentré dans le dictionnaire français qu'en 1961. Aujourd’hui, elles restent minoritaires en tant qu’agricultrices à part entière et leur proportion stagne depuis quelques années même si leur place dans le monde agricole a nettement évolué. Désormais, elles sont devenues des «actrices» incontournables du paysage agricole, tant parmi les chefs d’exploitations, que parmi les salariés.

Et les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon le ministère de l'Agriculture, en 2023, près d'un chef d’exploitation sur quatre est une femme. Un chiffre qui reste stable ces dernières années (27% en 2016, 25% en 2012) mais qui a considérablement progressé en 50 ans (8% en 1970). Par ailleurs, en 2019, 12,9% de l’ensemble des conjointes (mariées, pacsées ou en concubinage) d’exploitants ou d’entrepreneurs agricoles étaient affiliées en qualité de «conjointes actives» sur l’exploitation ou dans l’entreprise. Un chiffre divisé par deux en dix ans. Les femmes privilégient aujourd'hui le statut de co-exploitant pour travailler sur l'exploitation.

DES INÉGALITÉS DE GENRE

Malgré ces évolutions, les agricultrices sont toujours confrontées aux inégalités de genre, et de nombreux progrès restent à faire dans le domaine. Comme dans beaucoup d’autres secteurs, les femmes salariées ont des conditions d’emploi plus précaires, avec notamment un important recours au contrat à durée déterminée (CDD). Ainsi, 81,9% des salariées du secteur détenaient un CDD en 2019. Par ailleurs, toujours en 2019, 132.200 femmes d’exploitants étaient considérées «sans statut», c’est-à-dire qu’elles n'étaient ni cheffes, ni collaboratrices d’exploitation. Leur participation à la gestion des exploitations n’était donc pas directement mesurable, mais bien réelle.

Parmi les autres difficultés rencontrées, celle de l’héritage demeure encore en tête de liste. En effet, traditionnellement, lorsqu’il y a un frère dans la fratrie d'une famille de paysans, il apparaît encore comme naturel qu’il soit l’attributaire de l’exploitation. De fait, les femmes issues du monde agricole se retrouvent donc souvent lésées, avec moins de biens fonciers, et avec comme corollaire fréquent le fait que beaucoup d’entre elles épousent un agriculteur.

 Ecrit par : J. Bayard 

 

La tradition des vœux du Conseil de l'ordre des Journalistes France

C'est vers le milieu du XIXe siècle que la tradition des vœux est apparue en Angleterre, notamment grâce au développement du courrier postal et de la lithographie, avant de se développer peu à peu dans le reste du monde, surtout en Amérique du Nord ou au Japon.

Même si l'envoi d'une carte de vœux se fait toujours, nous utilisons tous désormais les SMS, les emails et les messages sur les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter ou Instagram pour souhaiter de bonnes fêtes de fin d'année à ses proches.

Présenter ses vœux pour les fêtes est une coutume qui perdure encore aujourd'hui dans la plupart des cultures, mais ce n'est pas facile de se renouveler d'année en année. On a même l'impression d'entendre toujours la même chose : « Bonne année, Bonne santé, parce que c'est important la santé !».

  • "Que l'année 2024 apporte le succès et la prospérité.
  • "Que la nouvelle année soit pleine de projets passionnants, de partenariats fructueux et de réalisations exceptionnelles pour notre entreprise.
  • "Que les défis à venir soient autant de chances pour démontrer notre esprit d'équipe.
  • "Que la collaboration fructueuse que nous avons partagée cette année se renforce davantage en 2024.
  • "Que cette nouvelle année soit aussi bien organisée que les post-it sur mon bureau.
  • "Que 2024 soit l'année où les réunions sont courtes, les cafés sont forts, et les projets sont menés à bien.
  • "Que vos idées soient toujours brillantes, vos cafés toujours chauds, et vos trajets domicile-travail aussi rapides que les mises à jour automatiques de votre logiciel préféré.
  • "Que cette année 2024 soit aussi réussie que le travail du correcteur orthographique de Google.
  • "Que la nouvelle année soit remplie de promotions, de projets passionnants et de pauses déjeuner sans discussions sur le travail.
  • "En cette fin d'année, je souhaite à chacun de nous des succès aussi nombreux que les e-mails dans notre boîte de réception. Bonne année à mes collègues qui gèrent tout avec style et humour !

Souhaiter une bonne année à votre entourage est un beau moment de partage. À une belle fin d'année étincelante et à une année 2024 pleine de promesses ! 

Je souhaite à tous vos adhérents une très bonne et heureuse année 2024.

Quelle vous apporte la joie à vous, vos familles et la réussite professionnelle.

En effet, nous exerçons un métier passionnant et ce, dans des conditions souvent très difficiles.

Le journalisme est un métier qui exige beaucoup de courage et d’investissement personnel.

Je voudrais profiter de ce moment pour saluer une fois de plus notre persévérance et notre volonté inébranlable d’informer le public en respectant totalement, notre charte nationale unique.

Je souhaite que vous puissiez éprouver en 2024 du Bien-être et du plaisir dans vos actions quotidiennes qui contribueront à la réussite du projet collectif qu’ensemble nous mettrons en œuvre  pour les Médias.

Bonne année à vous.

Ecrit par : J. Bayard 

 

 

 

 

2024 sera difficile pour les médias d’information

Début décembre, 30 journalistes, universitaires, patrons de médias et leaders philanthropiques de nombreux pays se sont réunis à Ditchley Park, un vieux manoir anglais situé à 100 kilomètres au nord-ouest de Londres. Ils étaient là à l’invitation de la Fondation Ditchley pour discuter des défis auxquels est confronté le « quatrième pouvoir ».

L’année 2024 sera, de l’avis des participants, une année cruciale pour la démocratie. Plus de 70 pays doivent tenir des élections nationales, dont les États-Unis, l’Inde et le Mexique. Dans certains de ces pays, des candidats extrémistes sont en position de force pour l’emporter. « L’une des plus grandes démocraties du monde pourrait devenir une dictature », a fait remarquer l’un d’entre eux, citant la dernière boutade de Donald Trump. Compte tenu des dangers qu’un triomphe de Trump pourrait entraîner pour la démocratie, comment les médias devraient-ils couvrir l’élection présidentielle de 2024 ?

Certains participants estiment qu’il est du devoir de la presse de lutter pour la démocratie : « La première cible des dictateurs est la presse libre. Il faut créer un mouvement en faveur de la démocratie. » D’autres, dont je faisais partie, ont plaidé pour que les journalistes s’en tiennent à une couverture rigoureuse et objective de l’actualité.

« Nous devons nous demander comment nous rendre plus dignes de confiance. Est-ce que le fait de se joindre au cri de guerre pour la démocratie renforce la confiance ? », a demandé la responsable d’une organisation à but non lucratif. Sa réponse était « non ».

Le rôle des médias sera particulièrement important dans la détection de la désinformation, une tâche qui devient de plus en plus difficile. En effet, grâce à l’intelligence artificielle (IA), les faux enregistrements et les fausses vidéos deviennent si sophistiqués qu’il est impossible de les distinguer des authentiques. Il se peut que la supercherie ne puisse être révélée qu’avec l’aide de… l’IA. Le cas récent d’un enregistrement, diffusé sur les médias sociaux deux jours seulement avant les élections nationales en Slovaquie, était présent dans l’esprit de nombreux participants. Sur l’enregistrement, on entend un homme politique de premier plan et une journaliste discuter de la manière de truquer les élections. On a appris par la suite que l’enregistrement avait été manipulé à l’aide de l’IA.

De manière plus générale, l’impact de l’IA sur les salles de rédaction a été abordé. Il s’avère que de nombreux organes de presse utilisent déjà l’IA pour des tâches de base telles que la vérification des faits et des sources, la traduction et la transcription. Les articles dont le format est fixe et répétitif, tels que les résultats sportifs et les données financières des entreprises, peuvent être rédigés par des applications d’IA. Cela signifie-t-il que les journalistes sont une espèce menacée ? La plupart des participants pensent que non, que l’IA pourrait être un outil puissant et utile entre les mains des journalistes, pour l’analyse des données utilisées dans le journalisme d’investigation, par exemple. « Nous devons embrasser la technologie, l’appliquer pour faire fonctionner notre métier », a déclaré un participant.

Un risque plus important pour les salles de rédaction vient du fait que les citoyens des démocraties se méfient plus que jamais des médias d’information. Selon un sondage international de l’Institut Reuters pour l’étude du journalisme, moins de la moitié (48 %) des personnes interrogées se disent très intéressées par les nouvelles, soit une baisse de 15 points de pourcentage par rapport aux 63 % de 2017. Non seulement moins de personnes consultent les nouvelles dans les médias traditionnels, mais aussi elles s’intéressent à d’autres sortes d’information. Le défi consiste donc à « prouver notre pertinence ».

Reste le problème du modèle économique des médias, gravement perturbé par des plateformes comme Facebook, Google, TikTok, etc. qui se taillent désormais la part du lion dans les recettes publicitaires. Comment les médias traditionnels peuvent-ils survivre sans ces revenus ?

Je retiens de la conférence qu’il n’y a pas un seul nouveau modèle d’entreprise qui sauvera le journalisme, mais plusieurs modèles, en fonction de la nature de chaque média et de son marché. L’un des invités de Ditchley a expliqué comment il avait lancé une société de médias proposant aux citoyens d’une grande ville des informations locales approfondies. Le média en ligne a rapidement attiré un grand nombre d’adeptes, tout en maintenant les dépenses à un niveau peu élevé. « Nous devons aborder les sujets qui intéressent les gens, a-t-il déclaré. Il y a peu de concurrence dans le domaine de l’information locale, de sorte que l’on peut obtenir un retour sur investissement significatif avec un investissement modeste. »

Dans de nombreux pays, les médias comptent sur les organisations philanthropiques pour combler une partie du manque à gagner. En effet, les grandes fondations s’impliquent de plus en plus dans le soutien aux organismes de presse. « Mais la philanthropie ne peut pas être la seule solution », a averti le dirigeant d’une de ces fondations. L’approche canadienne, selon laquelle les gouvernements fédéral et provinciaux subventionnent les médias, semble avoir suscité peu d’intérêt.

2024 sera une année difficile pour la démocratie et la presse libre. Dans de nombreux pays, les journalistes sont attaqués. Selon un bilan publié par Reporters sans frontières à la mi-décembre, 45 journalistes avaient été tués jusque-là en 2023 et 521, détenus. Un nombre bien plus important est victime de campagnes d’intimidation de la part de politiciens sans scrupules. Comment les médias doivent-ils réagir ? L’un des participants à l’évènement de Ditchley a déclaré : « Nous devons résister aux menaces et aux pressions exercées sur nous en faisant notre travail, pas en ripostant. » Des journalistes qui font leur travail, cela semble assez simple. Pourtant, tout le monde s’accorde à dire qu’il sera loin d’être simple de rendre compte de l’actualité au cours de l’année qui commence.

Ecrit par : J. Bayard 

 

La Cour de justice de la République : une institution contestée

La Cour de justice de la République (CJR) juge les membres du gouvernement pour les actes délictueux ou criminels commis dans l’exercice de leur fonction. Accusée d’être une justice d’exception, sa suppression a été plusieurs fois envisagée.

La Cour de justice de la République (CJR) est accusée d’être une justice d’exception, symbole d’une justice à deux vitesses. Sa création en 1993 avait pourtant pour objectif de réconcilier l’opinion publique avec ses responsables politiques.

Compétences, organisation et procédure

Créée par la loi constitutionnelle du 27 juillet 1993, la Cour de justice de la République (CJR) est mentionnée aux articles 68-1 et 68-2 dans le titre X de la Constitution (De la responsabilité pénale des membres du gouvernement).

La Cour est compétente pour juger les membres du gouvernement (Premier ministre, ministres, secrétaires d’État) pénalement responsables des actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions, qualifiés de crimes ou délits au moment où ils ont été commis. Les infractions n’ayant aucun lien avec la conduite de la politique de la nation sont du ressort des juridictions pénales de droit commun.

La composition et le fonctionnement de la Cour ont été fixés par la loi organique du 23 novembre 1993 sur la Cour de justice de la République.

La Cour est composée de quinze juges : douze parlementaires (six élus par l’Assemblée nationale et six élus par le Sénat) et de trois magistrats du siège à la Cour de cassation. Un de ces trois magistrats la préside.

La Cour peut être saisie par toute personne, française ou étrangère, qui s’estime lésée par un crime ou un délit imputé à un membre du gouvernement dans l’exercice de ses fonctions.

La procédure de saisine comprend trois étapes :

  • La commission des requêtes, composée de sept magistrats issus de la Cour de cassation, du Conseil d’État et de la Cour des comptes, décide de l’engagement des poursuites. Ce filtre est mis en place afin que le nouveau droit offert aux particuliers ne devienne pas une arme politique contre l’action gouvernementale. La personne qui se déclare victime saisit la commission des requêtes. Cette dernière décide de la transmission de la plainte au procureur général près la Cour de cassation afin de saisir la Cour de justice de la République. Elle peut, à l’inverse, prononcer le classement de la procédure.
  • Si la plainte est déclarée recevable, la commission d’instruction, composée de trois magistrats de la Cour de cassation, procède aux auditions des personnes se déclarant victimes et des personnes incriminées. Elle décide ou non du renvoi de ces dernières devant la CJR.
  • La formation de jugement, composée de trois magistrats et de douze parlementaires, se prononce à la majorité absolue et à bulletin secret sur la culpabilité du prévenu puis, en cas de culpabilité, sur l’application de la peine infligée. Son arrêt peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation, en cas de rejet de ses décisions, la Cour doit être recomposée avant de rejuger l’affaire.

Des ministres et des secrétaires d’État jugés

Depuis sa création, la CJR a prononcé un jugement à l’encontre de huit ministres et deux secrétaires d’État.

En 1999, dans l’affaire du sang contaminé, la CJR a relaxé Laurent Fabius, Premier ministre à l’époque des faits, et Georgina Dufoix, ministre des Affaires sociales et de la Solidarité nationale. Elle a condamné "pour manquement à une obligation de sécurité ou de prudence", tout en le dispensant de peine, Edmond Hervé, secrétaire d’État à la Santé.

En 2000, elle a relaxé Ségolène Royal, ministre de la Famille, poursuivie en diffamation par des enseignants qu’elle avait accusés de couvrir des actes de bizutage.

En 2004, la Cour a condamné, après une instruction de dix ans, Michel Gillibert, secrétaire d’État aux handicapés entre 1988 et 1993, "coupable d’escroquerie au préjudice de l’État", à trois ans d’emprisonnement avec sursis et 20 000 euros d’amende ainsi qu’à cinq ans d’interdiction des droits de vote et d’éligibilité.

En avril 2010, la Cour a condamné Charles Pasqua, ministre de l'intérieur à l’époque des faits, à un an de prison avec sursis pour complicité d’abus de biens sociaux et de recel dans l’affaire des détournements de fonds au préjudice de la Sofremi, société d’exportation de matériel de police dépendant du ministère. Il a été blanchi dans les affaires du casino d’Annemasse où il était poursuivi pour corruption passive, et celle de GEC-Alsthom dans laquelle il comparaissait pour complicité et recel d’abus de biens sociaux.

En mai 2011, le procureur général de la Cour de cassation, ayant relevé "de nombreux motifs de suspecter la régularité, voire la légalité du règlement arbitral litigieux pouvant caractériser le délit d’abus d’autorité" a demandé une enquête visant Christine Lagarde, ancienne ministre de l'économie, pour "abus d’autorité" dans l’arbitrage favorable à Bernard Tapie. Le 19 décembre 2016, elle a été reconnue coupable de "négligence", mais dispensée de peine.

En juin 2018, l’ancien garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas, soupçonné d’avoir transmis des informations confidentielles au député des Hauts-de-Seine Thierry Solère sur une enquête pénale le concernant, a été mis en examen pour "violation du secret professionnel". Le 30 septembre 2019, la CJR a condamné Jean-Jacques Urvoas à un mois de prison avec sursis et à une amende de 5000 euros.

En mars 2021, la CJR a relaxé l'ex-Premier ministre Édouard Balladur, qui était poursuivi pour complicité et recel d'abus de biens sociaux dans l'affaire du financement occulte de sa campagne présidentielle. Elle a en revanche condamné pour complicité dans la même affaire le ministre de la défense de l'époque, François Léotard, à une peine de prison de deux ans avec sursis et à 100 000 euros d'amende.

En novembre 2023, la CJR a relaxé le ministre de la justice, Éric Dupont-Moretti, poursuivi pour prise illégale d'intérêts.

En 1993, la CJR remplace la Haute Cour de justice

Jusqu’à la réforme constitutionnelle de 1993, seul le Parlement avait la faculté d’engager des poursuites à l’encontre des membres du gouvernement devant ce qui s’appelait alors la Haute Cour de justice, composée uniquement de parlementaires élus par chaque assemblée. Cette dernière devant être saisie après le vote d’un texte identique dans les deux assemblées était rarement convoquée.

La création en 1993 de la CJR avait pour objectif de réconcilier l’opinion publique avec ses responsables politiques. L'opinion jugeait  très sévèrement la classe politique qui lui semblait échapper aux règles communes en particulier lors de certaines affaires liées au financement de la vie politique et surtout lors de l’affaire dite "du sang contaminé".

La création de la CJR s’appuie sur les propositions du comité présidé par le doyen Vedel (Comité consultatif pour la révision de la Constitution) institué à l’initiative de François Mitterrand fin 1992. La CJR doit répondre à la nécessité d’établir une définition de la responsabilité pénale des élus et des responsables de l’exécutif dans l’exercice de leurs mandats et de leurs fonctions, tout en faisant en sorte que la justice n’interfère pas sur la politique menée.

Les projets de suppression de la CJR

La légitimité de la CJR est contestée. Selon Cécile Guérin-Bargues, professeure de droit public, ses décisions sont peu convaincantes, les condamnations très faibles, parfois assorties de jugement moraux. De plus, les ministres sont jugés par la CJR mais leurs conseillers par les tribunaux ordinaires, ce qui conduit à une justice à deux vitesses et des jugements peu cohérents.

La suppression de la CJR a été promise par François Hollande lors de la campagne présidentielle de 2012. La commission de rénovation et de déontologie de la vie publique, présidée par Lionel Jospin, reprend cette proposition dans son rapport remis en novembre 2012. Le projet de loi constitutionnelle du 14 mars 2013 relatif à la responsabilité juridictionnelle du président de la République et des membres du gouvernement prévoit la suppression de la CJR, "qui constitue un privilège qui n’a plus de raison d’être". Selon ce texte, les ministres devraient être jugés par les juridictions pénales de droit commun, y compris pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions, après autorisation préalable de la commission des requêtes. Renvoyé à la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République de l’Assemblée nationale, le projet de loi a été abandonné.

Dans le projet de loi constitutionnelle pour un renouveau de la vie démocratique présenté en conseil des ministres le 28 août 2019, la suppression de la Cour de justice de la République est de nouveau proposée, les ministres devant être jugés par la Cour d’appel de Paris. Ce texte n'a pas été examiné par le Parlement.

Ecrit par : J. Bayard