La distinction entre faits et commentaires
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- Catégorie : Article
- Publication : dimanche 1 janvier 2012 22:33
- Écrit par Bayard Julien
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Rapporté tel quel, un fait n'est pas toujours suffisant S'en tenir aux faits a des incidences sur la manière d'écrire. Tout journaliste professionnel se doit, en principe, de respecter un principe d'objectivité, en imposant une distance critique entre les faits et sa propre interprétation des faits. Ce point fait néanmoins débat, le journalisme engagé invoquant souvent l'impossibilité d'aboutir à une objectivité totale et le caractère éthique d'une prise de position subjective assumée en tant que telle. Là problématique spécifique de l'objectivité en journalisme est caractérisée par le caractère immédiat, présent, des faits relatés par le journaliste, l'urgence de la publication, la complexité des faits traités et l'économie des médias eux-mêmes. Plus que d'objectivité totale, on parle de pôle d'objectivation. Analysant la photographie, comme pure présentation du fait, il n'y a que des faits interprétés.
Or, ce statut de la photographie, la perfection et la plénitude de son analogie Une photographie de presse est un objet travaillé, choisi, composé, construit, traité selon des normes professionnelles, esthétiques ou idéologiques, qui sont autant de facteurs de connotation; et d'autre part, cette même photographie n'est pas seulement perçue, reçue, elle est lue, rattachée plus ou moins consciemment, par le public qui la consomme, à une réserve traditionnelle de signes .C'est cette problématique de l'objectivité qui a conduit à mettre en place, en particulier dans la presse anglo-saxonne, la distinction entre les faits et les commentaires. En principe, l'article factuel se borne à rapporter faits, citations et détails pratiques, avec un souci d'objectivité et de neutralité. À l'inverse, l'article de commentaire, en particulier l'éditorial, est un texte comportant d'évidentes marques de subjectivité, dans lequel un journaliste (souvent une plume reconnue par la profession ou le grand public) propose une analyse ou une interprétation des faits qui n'engage que lui ou son journal. Les grands organes de presse ont leurs éditorialistes attitrés dont la fonction n'est plus de rapporter les faits mais d'en proposer une lecture, parfois orientée politiquement ou philosophiquement. En pratique, cette distinction est parfois peu claire. D'une part, elle ne se manifeste pas toujours aux yeux du lecteur par des choix assez affirmés de typographie ou de localisation dans le journal; cette indistinction-là peut se trouver accrue dans les versions en ligne. D'autre part, il est souvent reproché aux articles factuels une objectivité insuffisante, car l'apparence de relation brute des faits peut masquer, délibérément ou non, une orientation partisane, philosophique ou idéologique : le choix des thèmes traités ou au contraire passés sous silence, l'ordre adopté dans la succession des informations au sein du journal, d'une page ou d'un article, la sélection et la hiérarchisation des idées au sein d'un article, ce qui est énoncé explicitement ou implicitement, le choix des noms, verbes et adjectifs aux connotations diverses, sont autant de procédés rédactionnels susceptibles d'influer sur l'interprétation du lecteur. Enfin, la distinction binaire entre faits et commentaires ne rend pas compte de la variété des types d'articles. De nombreux journaux proposent, au-delà des faits mais en deçà du commentaire, des analyses qui situent les faits dans un contexte plus large, les mettent en perspective.
Ecrit par : G. Vialy et J. Bayard


